"Le pont des soupirs" de Richard RUSSO *****
Alors qu'il
s'apprête à partir en voyage pour la première fois de sa vie, avec sa femme Sarah, le narrateur de ce récit, âgé de 60 ans, surnommé depuis son plus jeune âge Lucy, revient sur sa vie à Thomatson, une petite bourgade près de New York, où il a toujours vécu.
Énormément d'amour et de tendresse émanent de ce magnifique roman, grande fresque familiale et amoureuse. Je me suis arrêtée sur de nombreux passages que j'ai trouvés superbes. Car Richard Russo sait avec talent restituer les silences, les doutes, les interrogations, les peurs, le désir, la méchanceté, ou encore la bonté ou l'empathie.
Le récit de la vie de cet homme m'a beaucoup touchée. Sa sensibilité, ses relations amicales, amoureuses, ou familiales, les dialogues entre lui et sa mère, le regard de cet adulte mature qui revient sur l'enfant qu'il a été et les relations qu'il a eues avec son entourage sont tout simplement émouvants. A travers le récit de sa vie, c'est aussi celle de ses parents que nous livre le narrateur, et notamment le personnage de son père, et de sa lente ascencion sociale. Mais la mère n'en est pas pour autant absente. Il dresse un portrait sensible d'elle et des personnage ou des événements qui ont marqué sa vie, et notamment de son ami d'enfance, qui a un rôle clé dans sa vie. L'écriture est à la fois sobre et riche, et le récit lent et intimiste comme je les aime.
Déjà séduite par la première partie du roman, j'ai carrément été bouleversée par la deuxième, me régalant de cette façon délicate qu'a l'auteur de nous révéler la problématique des uns et des autres, leurs secrets, de revenir sur les actes manqués et la complexité des êtres.
Ce livre est le dernier de la sélection Elle que j'avais à lire, je la finis donc en beauté et non sans une certaine nostalgie.
Ce qu'en disent les jurées du grand prix des lectrices de Elle ici
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"Curieux comme notre perception du destin change au cours d'une vie. Jeunes, nous croyons ce que croient les jeunes, que tout dans l'existence est affaire de choix. Nous avons une centaine de portes devant nous, nous choisissons d'en ouvrir une, puis il en arrive encore cent, et il faut recommencer. Nous choisissons ce que nous ferons, mais aussi qui nous serons. Sans doute le bruit de chacune de ces portes qui, au fur et à mesure, se referment derrière nous devrait-il nous troubler, mais non. Même si elles se ressemblent et nous amènent au même endroit. Il s'en trouvera à l'occasion quelques unes de verrouillées, mais qu'importe, puisque tant d'autres ne le sont pas. Le choix lui même n'est peut-être qu'une illusion, mais nous n'en tenons pas compte. Nous sommes trop curieux de savoir ce que cache la prochaine [...] Mais il est un moment où tout cela change. Fruit de la déception et de la répétition, le doute remplace la curiosité. De guerre lasse, nous commençons à situer le vrai, à comprendre que les portes sont plus nombreuses derrière qu'il n'en reste devant."